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Sous la Paroi du Dragon.
Roman.
München: Carl Hanser Verlag, 2018.
ISBN978-3-446-25812-9.
Arno Geiger
Extrait
Ce roman saura-t-il trouver un public à Mondsee, cette localité autrichienne du Salzkammergut? Car, dans son dernier roman Unter der Drachenwand (Sous la Paroi du Dragon), Arno Geiger, né en 1968 dans le Vorarlberg, en dresse un portrait plutôt glauque au début des années 1940, c’est-à -dire en pleine Deuxième Guerre mondiale.
Le personnage principal du roman est le Viennois Veit Kolbe. Né en 1920, il fait son service militaire en 1939, après avoir passé le bac, au moment même où la guerre éclate, suite à l’invasion de la Pologne par l’armée d’Hitler. Dès le premier jour, Kolbe, dont le père enseignant est depuis près de vingt ans un national-socialiste convaincu, se retrouve soldat. Fin 1943, il reçoit des éclats d’obus. Le jeune homme, las de la guerre et fortementébranlé psychiquement, parvient grâce à son oncle à rentrer à Mondsee pour faire sa convalescence. Il y restera presque un an. C’est pendant cette période qu’il tombera amoureux de Margot, jeune femme venue de Darmstadt avec son bébé et dont le mari est soldat au front.
Outre au narrateur principal Kolbe, Geiger donne la voix à d’autres personnages. C’est d’abord le juif Alexander Milch, qui vit encore à Vienne en 1941 avec sa femme et son jeune fils et qui s’accroche à l’illusion qu’il ne leur arrivera rien tant qu’ils feront profil bas. Il y a ensuite la mère de Margot à Darmstadt qui envoie des lettres à sa fille à Mondsee. C’est ainsi que Margot apprend la destruction quasi totale de cette ville du sud de la Hesse.
Et enfin il y a Kurt, Viennois de dix-sept ans, dont la cousine de treize ans, Annemarie, est tombée amoureuse. Les deux jeunes gens échangent des lettres enflammées entre Vienne et Mondsee. Jusqu’au jour où Annemarie disparaît; on la cherche pendant des semaines, sans résultat; ce n’est que plusieurs mois plus tard que l’on retrouve sa dépouille dans les rochers de la Paroi du Dragon. Accidentou suicide?
Vers la fin de l’année 1944, Kolbe sera à nouveau déclaré apte au combat et renvoyé au front, où il devra, comme les autres personnages du roman, affronter une dernière fois le dragon dévastateur qu’est la guerre. À la fin du roman, Geiger n’évoque que brièvement qui a survécu et qui a succombé et quel sera le destin des rescapés après la fin de la guerre.
Au vu de l’œuvre précédente d’Arno Geiger, ce retour sur l'histoire contemporaine a de quoi surprendre. L’idée de Unter der Drachenwand est née de la découverte fortuite de documents historiques qu’il a complétés par des centaines de témoignages datant de l’époque.
C’est dans une langue sensible, poignante et raffinée, qui oscille entre rendu des émotions et impressions visuelles reflétant l’atmosphère de l’époque de manière de plus en plus explicite vers la fin, qu’Arno Geiger nous parle là d’individus dans les tourments de la guerre et des ravages que celle-ci cause autour d’eux et en eux.
Extrait du compte-rendu d’Alexander Kluy du 10 janvier 2018,
traduit par Nathalie Rouanet
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