logo kopfgrafik links adresse mitte kopfgrafik rechts
   
Facebook Literaturhaus Wien Instagram Literaturhaus Wien

FÖRDERGEBER

Bundeskanzleramt

Wien Kultur

PARTNER/INNEN

Netzwerk Literaturhaeuser

mitSprache

arte Kulturpartner

Incentives

Bindewerk

kopfgrafik mitte

Sophie Reyer: Zwei Königskinder.

de     en     fr     es     tr

Deux enfants rois.
Roman.
Vienne, Czernin Verlag, 2020.

Sophie Reyer

Compte rendu

 


Extrait

Quand j’ai fait la connaissance de Johanna, j’ai d’abord été frappée par sa canine de travers. Je crois que c’était à la chorale de la paroisse, par une de ces journées pluvieuses. Ma mère avait cessé de vivre au village, et mon père de parler, la plupart du temps. Une sorte d’ombre allait de pair avec le silence. Peut-être ne savait-il pas quoi faire de moi. Toujours est-il qu’il m’envoyait le plus souvent passer l’après-midi à la paroisse. Il n’y avait pas beaucoup d’autres possibilités, c’était un petit village, jeté sur les vignobles vallonnés où soufflait toujours trop de vent. Dans mon souvenir, il y a cette canine. Je me rappelle que j’épiais Johanna. Quand elle chantait, elle ouvrait grand sa bouche étroite et ressemblait à un poisson. À chaque fois, je voyais la dent, un peu trop grande, légèrement saillante et retenue par un appareil dentaire. J’ignore pourquoi, mais cette dent me plaisait. (...)
J’ai su ce soir-là qu’il me fallait devenir son alliée. Je l’ai regardée chanter, j’ai entendu éclater de joie sa voix aiguë de jeune garçon. J’ai écarquillé les yeux. Elle a baissé pudiquement le regard. Ses cils avaient des reflets d’or sombre. Cela m’a fait sourire.

(Extrait original p. 8-9)

Les arbres changeaient d’apparence selon les saisons et ressemblaient à des visages humains, parfois en pleurs, souriants parfois, parfois plissant les yeux dans le soleil. J’allais régulièrement au parc, en semaine avec Birgit, les week-ends avec mon père. J’y ramassais du gravier et le laissais couler entre les doigts, je m’émerveillais des écureuils frétillants qui couraient vers moi. Je n’arrêtais pas de penser à Johanna. Parfois, je tendais à l’un d’eux une noix cassée, les écureuils avançaient la tête, ils avaient des mouvements saccadés. Il arrivait qu’une des petites bêtes s’approche au point que j’aurais pu l’attraper. Mais j’étais incapable de bouger. Comme avec Johanna. Après, je m’accroupissais. Je déposais délicatement les cerneaux de noix par terre. Ils ressemblaient à des marrons. Un peu comme des petits cerveaux ridés. Leste, l’écureuil se baissait, chipait la noix, une ondulation rapide, son panache brun qui échappait à mon regard. J’aimais la couleur de l’automne, cerfs-volants qui s’élançaient au-dessus de la cime des arbres, voltigeaient multicolores dans le vent. Chaque feuille était une île au trésor avec ses dessins, ses crénelures, ses nervures. Je noyais mon regard dans les veinules ramifiées, je regardais la feuille se flétrir, s’enrouler sur elle-même puis se racornir. Le vent m’arrachait la capuche du visage, les branches des arbres nus craquaient ; parfois, des rideaux de brume flottaient au-dessus des prés derrière le chemin de gravier, et il se mettait à neiger. Enfant, je faisais de grosses boules de neige, je façonnais une tête, avec des cailloux pour les yeux.
« Tu ne peux pas l’emporter à la maison Â», avait dit ma mère.
« Pourquoi ? Â»
« Elle va fondre. Â»
« Mais on peut la mettre au congélateur ! Â», m’étais-je entêtée.
« Non. Â»
« Mais pourquoi ? Â»
Je m’étais mise à pleurer.
« Donne-la moi. Â»
J’avais levé les bras pour montrer à ma mère la tête blanche dont je sentais le froid au bout de mes doigts. Je voulais la lui donner. Ma mère portait des gants en cuir. Elle avait fait le geste d’attraper le visage de neige, ses mains avaient saisi le vide, la tête tombée par terre avait roulé. Puis s’était brisée.
« Pardon. Â»
J’avais conscience que ma mère l’avait fait exprès. Je réfléchis. Pourquoi est-ce qu’on nous ment comme ça, quand on est enfant ? Au-dessus du ciel d’une clarté ardente passa un vol de corneilles. Craillements. Des enfants dans des poussettes que l’on promenait devant moi me regardaient avec un regard éteint. Il me semblait que Johanna était le seul être humain que j’aie jamais rencontré.

(Extrait original p. 146-148)

© 2020, Czernin Verlag, Vienne
© Traduction française : Nathalie Rouanet, 2020

>> Incentives

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Link zur Druckansicht
Veranstaltungen
Grenzenlos? (Literaturedition Niederösterreich, 2020) - online

Do, 14.01.2021, 19.00 Uhr Buchpräsentation mit Lesungen Die Veranstaltung kann über den Live...

Super LeseClub mit Diana Köhle & David Samhaber - online

Mo, 18.01.2021, 18.30-20.30 Uhr online-Leseclub für Leser/innen von 15 bis 22 Jahren Anmeldung...

Ausstellung
Claudia Bitter – Die Sprache der Dinge

14.09.2020 bis 25.02.2021 Seit rund 15 Jahren ist die Autorin Claudia Bitter auch bildnerisch...

Tipp
LITERATUR FINDET STATT

Eigentlich hätte der jährlich erscheinende Katalog "DIE LITERATUR der österreichischen Kunst-,...

OUT NOW flugschrift Nr. 33 von GERHARD RÜHM

Die neue Ausgabe der flugschrift des in Wien geborenen Schriftstellers, Komponisten und bildenden...